Essai de nouvelle

bon, j'arrête un instant la poésie pour tester la nouvelle...
là, c'est du très court (du recto verso en manuscrit, à peine une page en tapé sur l'ordi...)
bon, bien sûr, je reste dans le sombre... très sombre...


Une blanche volute de fumée s'élève dans la nuit. Un léger rougeoiement éclaire imperceptiblement la pièce, avant que la cigarette ne s'éloigne au-dessus de la rue. La silhouette assise sur le rebord de la fenêtre inspire profondément, bloque sa respiration et ferme les yeux... Et relâche le tout quelques instants plus tard. Doucement, son regard se déporte vers l'horizon bloqué par les immeubles, vers cette ville si calme, d'où provient néanmoins quelques sons, se mêlant à l'aiguë mélodie de Miles Davis.



L'être se laisse glisser à l'intérieur et referme calmement la fenêtre après un dernier regard à la Lune. Une lampe de bureau projette sa lumière chaleureuse sur un appartement sobre et parfaitement rangé. Sur une table traîne une feuille couverte de quelques lignes centrées. La personne y jette un coup d’œil, ferme les yeux, murmure quelque chose, remue ses doigts, hésite, murmure autre chose, sourit, ouvre les yeux, prends un stylo et écrit un nouveau vers.



L'homme s'installe confortablement dans un vieux fauteuil de cuir et tend le bras. Sur une petite table proche est posée un verre vide aux deux tiers qu'il prend dans un geste poli par l'usage. Ce faisant, il tire sur sa manche de l'autre main, ajustant une chemise sombre à la coupe parfaite. Son regard d'un bleu aussi froid que la glace balaie tranquillement la pièce. Un mince collier de barbe entoure son visage, vide de tout cheveux, soigneusement attachés en queue de cheval à la base du cou.



Une fois le verre, vidé de son contenu, reposé, il déploie lentement son corps alors qu'il se relève, et se dirige vers une porte dans le vestibule. Au passage, il s'empare d'un long manteau noir, dont il vérifie soigneusement le contenu des discrètes poches intérieures. Alors, il ferma une fois de plus ses yeux, se remémorant le visage de cette personne dont il a la photo dans son portefeuille, cette photo qu'il a si souvent regardée ces derniers jours. Il tâte dans sa poche intérieure gauche ce présent qu'il a préparé, et rouvre les yeux, un léger sourire sur le visage. D'un geste calme, il pousse la porte et sort, la refermant derrière lui.



Les rues sont désertes. Aucun véhicule ne trouble l'asphalte auprès de lui. La lumière grésillante des vieux lampadaires laisse quelques zones d'ombre dans lesquelles il disparaît parfois. Sa démarche réfléchie ne laisse entendre aucun bruit lorsque ses chaussures de cuir se posent sur le sol. Il connaît parfaitement son chemin à travers le dédale des rues, chemin qu'il a si souvent parcouru et qu'il parcourra encore longtemps. Au détour d'une ruelle, il voit, s'avançant vers lui cette personne dont il revoyait le visage encore quelques instants plus tôt. Ils se rapprochent,se reconnaissent, se saluent d'un léger hochement de la tête... Et continuent leur chemin, chacun de leur côté.



Il se retourne vers ce passant l'instant d'après, glisse silencieusement la main dans sa poche, sors de son étui l'objet préparé qui reflète un instant la lumière de la Lune, et le lui offre. L'autre semble un instant le refuser, surpris, alors il le lui propose d'une autre manière. Nouveau refus. Alors il laisse là l'inconnu, encore stupéfait du geste, mais que bientôt il oubliera. L'homme repart, tout aussi impassible et sans émotion que lors de cet échange muet, ne laissant derrière lui qu'un corps d'où s'échappe un mince filet rouge, abreuvant le sol.